Réalisé par Peyton Reed
Avec
Renée Zellweger, Ewan McGregor et Sarah Paulson
Édité par 20th Century Fox
Qui aurait pourrait croire que derrière cette comédie anodine
se cache l’un des plus marquants hommages du cinéma
(hollywoodien) des années 50 ? Personne ! Pas même le
distributeur apparemment qui, trop occupé à mettre en avant
les stars du casting (Renée Zellweger / Ewan McGregor), en
oublie les principes de base d’une distribution digne de ce
nom ; intention du film, univers développé. Le spectateur, si
tant est qu’il fût désireux d’aller plus loin qu’un titre et
deux noms sur une affiche mal agencée, en est réduit à devoir
se nourrir d’une bande-annonce passe-partout accompagnée
d’une accroche pesante « attention sexe à la carte »… voilà,
bonsoir, merci, film suivant s’il vous plaît. C’est vrai
quoi ? N’êtes-vous pas las de passer à côté de purs moments
de cinéma tout ça parce que le marketing doté d’un ridicule
budget sur ce film aura décidé de saboter sa sortie ciné ? Et
tout ça pour quoi ? Parce que les résultats dans son pays
d’origine n’a pas eu le succès escompté ou tout simplement
parce qu’il n’y a pas de « nom » à la réalisation !
Et pourtant, « Bye bye Love » est un de ces hommages que le
cinéma n’est pas prêt d’oublier. A la fois, grandiose,
caricatural et désuet à souhaits, tout je dis bien tout, du
moindre petit bibelot à la reproduction de New York grandeur
nature, déborde d’affection à la fois nostalgique et
respectueuse pour cette époque qui a vu passer sous l’oeil de
ses caméras les plus grandes stars et les plus grands films
aussi. Bourré d’humour et de références, « Bye Bye Love »
recrée trait pour trait l’ambiance naïve et l’atmosphère
survoltée des fifties en parodiant les scènes mythiques de
ses aînés. Attention ! Pas une spoliation bête et méchante
pour élève en dernière année de cinéma appliqué à imiter le
travail des Grands. Non ! Une oeuvre originale jusque dans sa
trame (cf. la machination abracadabrante de Barbara Novak)
dont la créativité débridée donne souvent cours à
d’authentiques instants de poésie (cf. la scène où Block et
Novak se préparent sur la variation de « Fly me to the Moon »)
et de détournements hautement inspirés (cf. la scène de la
conversation téléphonique entre Block et Novak au sortir de
la douche).
Peyton Reed, auteur du déjà très décalé
American Girls, récidive en
s’attaquant à nouveau avec succès au film de genre… Rayon
pastiches et comédies. Sa grande spécialité jusqu’ici ! Une
spécialité qui lui va comme un gant, exhibant à foison sa
passion immodéré pour le cinéma bien réalisé, bien rythmé,
bien raconté. Un cinéma décomplexé qui a parfaitement intégré
les règles du second degré. Ce second degré si délicat,
utilisé à tort et à travers, dès qu’une ombre de plans
rappelle vaguement une scène connue. Ici, l’arme à double
tranchant est parfaitement maîtrisée. Howard Hawks en eût été
fier ! Comme il eût été fier de ces interprètes admirablement
choisis jusqu’à la « silhouette » (rôle sans dialogue). Aucun
de ces « Bye Bye Lovers » ne fait tâche dans le tableau. Tous
ont trop à coeur de donner vie à cette galerie de portraits
issus d’un autre âge… celui de l’innocence mais aussi celui
des tabous et des préjugés. Celui où la censure le disputait
au besoin d’oublier les années noires de la guerre. Celui de
la fuite en avant, des lunettes roses et des ornières. Ce
temps où l’homo americanus découvrait les joies du jetable et
de la consommation.
Un univers dans lequel le cinéma contemporain puise
régulièrement. Reed y puise à son tour avec adresse et à
propos et transforme ainsi son film en une fresque
figurative. Au centre de cette fresques, le couple Zellweger
/ McGregor épatants de crédibilité… lui en Cary Grant, elle
en Kim Novak ! Bien sûr il faut de l’imagination quant au
physique et à la carrure mais les gestes, les poses, les
sourires sont clairement balisés. Ce sont ceux de stars
mythiques immortels à nos mémoires cinéphiliques. Et comme si
les dialogues, le geste et la voix ne suffisaient pas, Peyton
Reed complète la caricature en y ajoutant le cadre et la
lumière. (cf. Catcher Block sous la pluie voyant s’éloigner le
taxi). Comme s’il s’agissait non pas d’y être mais de vivre
l’expérience de ces prestigieuses années. Musiques, costumes,
sonorisations et décors, rien n’aura été oublié dans cette
fidèle et bien vivante reconstitution.
Le résultat, visible à l’oeil nu, est proprement
époustouflant. Emprunts et traits d’esprits se succèdent dans
une inénarrable fougue, s’amusant au passage des codes
scnéaristiques de l’époque (cf. la double intrigue amoureuse
ou la longue et tonitruante révélation de Barbara Novak).
Parodie, pastiche, auto-parodie, clin d’oeil, Reed utilise
toutes les armes allant de la dérision à l’auto-dérision.
L’objectif: que toutes ces références ne s’empilent pas
stérilement. Pour les plus sagaces d’entre vous, vous aurez
reconnu La Mort aux trousses,
Confidences sur l’oreiller, Un Pyjama pour deux,
Certains l’aiment
chaud… et bien d’autres… on ne peut malheureusement tous
les citer tant l’atmosphère et les scènes du films
fonctionnent comme une véritable éponge. Elles absorbent le
meilleur pour ne retenir de ces intrigues éparses que la
quintessence. La multiplication des références soustrait les
chefs d’oeuvre à l’oubli. La retenue divisera sans doute
beaucoup d’entre vous. Mais il est clair que l’addition de
scènes empruntées à la créativité des aînés avec autant de
doigté amène inévitablement à considérer deux dénominateurs
communs à « Bye Bye Love » : la passion et le talent. Ce qui
(tout compte fait) est infiniment réjouissant !
Alors bienvenue… bienvenue dans cet univers aseptisé des
années 50 où l’horizon ressemble à du carton pâte, les robes
à des tape-à-l’oeil et les héros à des super / wonderwomen.
Bienvenue dans cet univers dont nos contemporains se sont
très vite débarrassé, jetant du même coup avec l’eau du bain
le formidable romantisme et l’énergique optimisme que seuls
savaient véhiculer les films de cette époque. Merci pour ce
bel instant de nostalgie… Merci pour ce grand moment de
cinéma…
Le distributeur cinéma avait réussi l’exploit de louper la
sortie du film. L’éditeur vidéo tente de le renouveler.
Packaging raté, photos mal exploitées, absence d’accroche,
couleurs adaptées aux nanars de série B… bref rien n’aura
servi de leçon dans le sabotage inintelligent de la
distribution du film sur grand écran. « Bye Bye Love ».
Comment a-t-on pu même songer à garder un tel titre ? Le
travail n’est ni fait ni à faire et n’honore certes pas un
éditeur qui nous avait habitué à bien mieux que ça.
Côté bonus, c’est la Sibérie. En exil, quelques documentaires
saucissonnés pour donner l’indélicate impression d’une
profusion d’informations. Au final, rien de vraiment solide à
se mettre sous la dent. C’est franchement frustrant !!! Quand
on pense au titanesque et passionnant travail de
reconstruction qu’il y a derrière le film, on a juste envie
de hurler son désarroi à l’éditeur. A quand la version
collector ?
L’insertion de la galette dans le lecteur n’arrange pas
franchement les choses. On frise le tout statique en dépit
d’une introduction très cartoon qui nous mène directement au
menu principal. Petite musique d’ambiance : celle du
film… et puis plus rien. Ni transition, ni menus animés, ni
même une quelconque musique agrémentant le choix des langues,
du chapitre et autres… Ce n’est pas qu’on s’acharne mais on
aurait sincèrement aimé que le travail soit grandement plus
soigné. Heureusement… il reste le film !!!
Ce qui est plutôt cher payé compte tenu du peu d’intérêt des
suppléments. Annoncés : 1 commentaire audio, 5 scènes
inédites, 4 featurettes, 6 documentaires et 1 test vêtements
et coiffures… plus bien évidemment tout ce qui concerne la
promo musicale. A l’arrivée, pas de quoi faire un making of
fouillé ni même un making of décalé. Inlassablement,
l’histoire nous est répétée, comme si après avoir regardé le
DVD, nous avions encore des doutes sur les grandes lignes de
l’intrigue. Où sont les storyboards, les modèles, les
comparaisons avec les scènes originales des films qui ont
servi de référents. Bref… où est la matière ? Préparez-vous
à plonger dans le trou noir, anti-matière à l’horizon :
Le Documentaire Spécial HBO (12’35 - VOST)
Et voilà le documentaire le plus abouti auquel vous aurez
accès. C’est dire !!! Vous pouvez enlever 3 bonnes minutes
d’extraits de film et il ne reste plus que 9 minutes aux
artisans de « Bye Bye Love » pour nous expliquer comment a
été conçu le film de A à Z. Vous trouvez ça léger ? Nous
aussi !!! Mais ça ne semble pas gêner le réalisateur quel
qu’il fût. Résultat : on parle de tout et de rien, de
l’intrigue, de la musique, des acteurs, des vêtements, du
réalisateur… enfin bref, ça part dans tous les sens tant et
si bien qu’on ne sait plus ni qui parle ni de quoi on parle.
Le cadet des soucis du réalisateur quel qu’il fût puisque
pour donner encore plus de rythme et de conviction à ce
fatras sans consistance, il pratique un montage cut enchaîné.
Du coup, l’intervenant précédent qui n’avait pas fini sa
phrase se voit coupé dans son élan par l’intervenant suivant
et ainsi de suite sans marquer la moindre pause. C’est
épuisant et agaçant. Qui a réalisé ça ? Mystère !!! Peut-être
at-il eu honte d’y mettre son nom ??? Sage décision !!!
Here’s to Love : le Clip vidéo (3’34 - VOST)
On a beau se dire qu’il ne s’agit là que d’un élément
bassement promotionnel, force est de reconnaître que le clip
vidéo type « émission Champs-Elysées » a de la tenue. La
chorégraphie, les décors, le timing, tout y est ! Sans
compter que depuis Moulin Rouge ! pour McGregor et
Chicago pour Zellweger, les deux acteurs ont révélé
au grand jour le bel organe dont ils étaient pourvus. Certes,
ce n’est pas du Sinatra mais ce n’est pas non plus du
« Popstars ». Dans la plus pure tradition des comédies
musicales, ça se laisse voir et écouter avec beaucoup de
plaisir et de bonne humeur ! Une excellente surprise !!!
Le must, le hit, la timbale !!! Si vous comprenez à quoi elle
sert, par pitié, écrivez-le moi ! Rien, nulle présentation,
introduction et pas le moindre commentaire. Ca nous est servi
brut de fonderie et ça reprend exactement l'une des scènes du
film (le découpage qui nous permettait d'apprécier les
réactions de Catcher Block face aux révélations de Barbara
Novak a été enlevé, c'est la seule modification). Etait-ce
vraiment utile ? Pourquoi l'avoir ajouté ici, sans autre
cérémonie ??? Va comprendre Charles...
Test vêtements et coiffures (1'04 - VOST)
Ex aequo avec « Guess my Game ». Sympathique, drôle mais
totalement inutile. Aucun commentaire, aucune direction,
aucune explication… les tests se résument à un défilé de
mode sur l’une des musiques du film. Autant dire que la
technique, on s’en balance !!! Pourquoi avoir choisi tel ou
tel costume, coiffure, tenue ? Autant de questions auxquelles
on a ici manifestement pas envie de répondre. Encore un
supplément de gâché !
Le Témoignage (36’-VOST)
On poursuit dans le farfelu superflu avec ce faux témoignage
d’une opératrice téléphonique dont la vie a été transformée
par le livre de Barbara Novak. En réalité, il s’agit d’une
« Private Joke » ; l’opératrice n’est autre que la femme de
Peyton Reed, le réalisateur. Voilà ! Que dire d’autres ?
Pitié peut-être ???
Le Bêtisier (6’35 - VOST)
Enfin !!! Une section un peu délire qui nous montre
l’ambiance sur le plateau. Entre lapsus, maladresses,
plaisanteries, insectes et autres, il y a de quoi varier les
plaisirs. C’est le clou de cette édition et on aurait
souhaité (ô combien ardemment) que l’ensemble des animations,
suppléments et autres fussent à son image. C’est le meilleur
bêtisier en DVD… à voir absolument !
5 scènes inédites (3’49 - VOST)
Montées, bruitées, mises en musiques et commentées, elles
sont présentées dans une qualité qui ne déshonore ni le film
ni le support. Toutefois, la compression utilisée laisse de
temps à autre à désirer. Le réalisateur a eu raison de les
couper car la quasi-totalité des scènes inédites n’apportent
rien à l’histoire, excepté peut-être celle du Comité de
Direction lors duquel Vikki a du mal, en tant que femme, à
imposer ses choix artistiques. Voici le détail :
- La séance photo de Barbara
- Le Comité de Direction
- Tête à tête dans le parc
- Peter est nerveux
- Mise au point et mise en pli
Les 6 Documentaires (16’27)
Moins complets que le documentaire spécial HBO mais beaucoup
plus fouillés, Peyton Reed fait ici le pari de nous expliquer
les techniques utilisées pour aboutir au résultat que l’on
voit à l’écran. Malheureusement, là encore, ce ne peut être
qu’un survol. L’écran vert, les costumes, la musique auraient
eu besoin d’une décomposition étape par étape. Ici, comme on
doit aller très vite, on a juste le temps d’effleurer la
technique avec quelques extraits piochés par ci par là. Sans
compter le passage sur Tony Randall qui vient occuper 3
bonnes minutes du making of. C’est clairement se foutre du
monde ! Quand on pense que
La Ligue des Gentlemen Extraordinaires a bénéficié d’une
avalanche de suppléments intéressants, on voit combien « Bye
Bye Love » a été misérablement sacrifié sur l’autel de la
rentabilité !!!
Même si l’image de « Bye Bye Love » est loin d’être
approximative, elle n’est cependant pas à la hauteur de ce
que nous sommes en droit d’attendre. Tout spécialement
lorsqu’on sait quelle qualité d’image l’éditeur réserve à ses
Blockbusters. Disons-le tout net ! A l’instar du packaging,
de l’animation et des suppléments, l’éditeur n’a pas
réellement fait d’effort pour fournir une image d’une qualité
supérieure à la moyenne.
Les couleurs manquent de contrastes, les nuances de
franchises, la lumière d’éclat et le grain de finesse.
Quelques arrières plans qui font le sel de cette édition de
par leur cachet et de par leur fausseté affichée (immeubles
peints, images de films ou encore travelling arrières de
circulation… ) se montrent d’une bonne qualité sans
atteindre l’excellence. Evidemment, certaines de ces images
ne sont pas de la première jeunesse. Mieux, elles hurlent
leur présence dans le film à des fins de second degré mais
leur manque de d’absolue netteté a la fâcheuse tendance de
réduire la profondeur de champ. Du coup le plaisir
cinématographique est un rien gâché.
Néanmoins, il ne faut pas se montrer injuste. Le transfert
demeure de qualité ; compression fluide sans tâche ni bruits.
L’éditeur s’en sort malgré tout avec la satisfaction du
travail bien fait. Mais en ce cas présent et pour ce film si
soigné dans son choix des décors, ses partis pris de mise en
scène et ses costumes d’une beauté d’un autre âge, le mieux
n’aurait pas été l’ennemi du bien. Le Cinémascope a réinventé
la projection dans les salles. L’éditeur aurait pu réinventé
la projection sur nos écrans de télé. Peut-être une autre
fois ?
Voilà enfin le point fort du DVD : le son. Image, mise en
scènes, costumes et décors donnent un cachet à cette comédie
mais seul le son lui procure le dynamisme nécessaire pour se
mesurer à L’Impossible
Monsieur Bébé, Les Hommes préfèrent les blondes ou
encore Certains
l’aiment chaud. Seule la musique lui donne ce rythme si
particulier. Ce rythme qui ont fait la spécificité des
comédies marquées années 50.
Dolby Digital 5.1 VF et VO, soit une absence complète de DTS,
ce qui n’est abolument pas gênant. Encore une fois, il vaut
mieux un Dolby Digital bien mixé qu’un DTS faiblard. Et ici,
le mixage est parfait. Les voix sont claires et permettent
aux spectateurs de saisir les répliques et traits d’esprits
même quand ils fusent (cf la scène où Block se fait embaucher
par Novak). Les innombrables bruitages ponctuent la bande-son
en sollicitant assez fréquemment les surrounds. Quant à la
musique, jamais le couple Sinatra n’a été aussi bien traité.
Le somptueux passage qui souligne la préparation
vestimentaire des deux tourtereaux est une pure merveille de
subtilité perchée quelque part entre aïgus très féminins et
graves sauvagement masculins. Une séuqence à se passer en
boucle !!!
Nous terminerons sur la traditionnelle comparaison entre VF
et VO. Comme à l’accoutumée, la VO est à préférer notamment
pour les intonations uniques de chacun des acteurs sans
oublier l’accent du Kentucky qu’emprunte l’écossais Ewan
McGregor… une véritable performance ! Néanmoins, si vous
n’êtes pas un anglophone distingué ni un adepte des VO, vous
ne serez nullement sanctionné. La VF est d’excellente
facture, le doublage pas si mauvais, et les différences en
termes d’amplitude et de profondeur très peu marquées. De
quoi vous emmener sur la Lune et vous laisser jouer parmi les
Etoiles !
A tous ceux et toutes celles qui ont besoin
d’Amour… excellente séance DVD !