Réalisé par Alice Winocour
Avec
Vincent Lindon, Soko et Chiara Mastroianni
Édité par ARP Sélection
Paris, hiver 1885. A l’hôpital de la Pitié Salpêtrière, le professeur Charcot étudie une maladie mystérieuse : l’hystérie. Augustine, 19 ans, devient son cobaye favori, la vedette de ses démonstrations d’hypnose. D’objet d’étude, elle deviendra peu à peu objet de désir.
En tirant son premier long métrage d’une histoire vraie, la réalisatrice Alice Winocour signe avec Augustine un vrai petit coup de maître. En privilégiant d’emblée un aspect plus fantastique plutôt qu’un point de vue trop naturaliste pour parler du thème de l’hystérie, la jeune cinéaste livre un superbe (les décors, les costumes, les cadres, les couleurs), ambitieux et souvent fascinant objet de cinéma qui détonne dans le panorama cinématographique français.
Il est évident que des réalisateurs de genre tels que David Cronenberg et David Lynch aient du inspirer Alice Winocour du point de vue formel, d’autant plus que la superbe photographie glacée signée Georges Lechaptois, à qui l’on doit les magnifiques images de Belle Epine et Americano, plonge les personnages dans une atmosphère oppressante et quasi-surnaturelle, dans un contexte pourtant bien réel, d’autant plus que de vraies femmes malades ont participé pour la figuration à l’instar des scènes de témoignages face-caméra.
Dans le rôle titre, Stéphanie Sokolinski alias Soko, jeune chanteuse et comédienne surdouée découverte dans A l’origine de Xavier Giannoli et en Béatrice Dalle ado dans Bye Bye Blondie, se livre corps (les scènes de crises comme une possession par le démon sont plutôt dingues) et âme à la caméra d’Alice Winocour, crève littéralement l’écran et confirme tout le bien que l’on pensait d’elle. A ses côtés et c’est devenu une habitude, Vincent Lindon excelle dans le rôle ambigu du professeur et père de la neurologie Jean-Martin Charcot et trouve en Soko une partenaire à la hauteur de son immense talent.
Tout au long de cette histoire passionnante,les rapports troubles dominant-dominé ne font que s’inverser dans un monde quasi-clos, les regards et gestes sulfureux sont avortés jusqu’à l’explosion finale où les corps rentrent en contact de manière violente et sulfureuse. Un premier film envoutant, féministe, engagé et très prometteur.
Le menu principal musical et animé sur des photos tirées du film est certes élégant mais la police demeure un peu petite.
Malheureusement, nous ne trouvons pas de making of, de documentaire historique, d’interviews ou de commentaire audio de la réalisatrice. Outre la bande-annonce, l’éditeur joint néanmoins deux géniaux courts-métrages mis en scène par Alice Winocour.
Le premier s’intitule Kitchen (2005, 15’). Une jeune femme prépare une recette de homard à l’américaine. Elle doit découper en morceaux les crustacés vivants avant de les jeter, toujours vivants, dans l’huile bouillante. Seule dans sa cuisine, face aux homards qui bougent encore, elle essaye de les tuer le plus proprement possible. Interprété par Elina Löwensohn, ce film a été présenté à Cannes et a reçu l’Ours d’argent au Festival des Nations d’Enbensee, ainsi que la Mention spéciale à la Biennale Européenne du court-métrage de Ludwigsburg en 2005.
Le second court-métrage disponible, Magic Paris (20’) a été réalisé en 2006 et met en scène Johanna Ter Steege. Lutin de la meilleure actrice en 2008, ce film raconte l’histoire de Kate, une étrangère de quarante ans, qui vient passer un week-end seule à Paris. Elle va rencontrer un homme et un chien. Cette petite comédie romantique ne va pas se passer comme prévu. Magic Paris a permis à Alice Winocour de décrocher le diplôme du jury au Festival International du documentaire, du court-métrage et des films d’animation à Saint-Petersbourg.
Le master Haute Définition rend parfaitement hommage à la magnifique photographie du chef opérateur Georges Lechaptois (Twentynine Palms, Belle Epine) et sa colorimétrie froide voire glaciale, les teintes parfois sépia et les noirs sensiblement poreux. L’aspect vaporeux de certaines séquences est consolidé par une compression de haute volée, les détails sont appréciables, les contrastes joliment appuyés.
ARP joint une piste unique. Le mixage DTS-HD Master Audio 5.1 est d’emblée immersif grâce à une balance frontale riche et dynamique, soutenue par des effets latéraux souvent saisissants à l’instar du tonnerre et de la pluie diluvienne. Les séquences silencieuses sont limpides et les voix solidement plantées sur le canal central. L’éditeur joint également les sous-titres destinés au public sourd et malentendant.