Réalisé par Ari Aster
Avec
Toni Collette, Gabriel Byrne et Alex Wolff
Édité par Metropolitan Film & Video
Steve, Annie et leurs deux enfants adolescents, Peter et Charlie, se préparent à assister aux obsèques de la mère d’Annie, une personne bizarre qui s’adonnait au spiritisme…
Hérédité (Hereditary) est le premier long métrage d’Ari Aster. Réalisateur et scénariste de sept courts, il met la touche finale, au moment où nous écrivons ces lignes, à Midsommar, racontant le voyage, qui tourne mal, d’un jeune couple en vacances dans un coin reculé de la Suède… un autre film d’horreur.
Hérédité, avec une grande économie d’effets horrifiques, sans flots d’hémoglobine, sans jump scares, réussit à faire naître une ambiance trouble, délicieusement angoissante au sein d’une famille dysfonctionnelle. Pas du genre de celle des rednecks qu’on rencontre en prenant des raccourcis aux fins fonds de l’Amérique profonde. Non, une famille BCBG, très fréquentable. Lui, Steve, est psychiatre, elle, Annie, construit des maisons de poupées et les deux enfants, Peter, 17 ans, et sa soeur Charlie, 13 ans, vont au lycée… tout bêtement.
Une famille normale… enfin presque. Le jour de la célébration des obsèques de la mère d’Annie, on commence à percevoir les tensions dans le noyau familial. Faut-il, pour autant, s’inquiéter de petits phénomènes étranges, comme une porte habituellement fermée à clef retrouvée ouverte, ou le changement d’expression du reflet d’un visage dans un miroir ? Au début, non : ils ont certainement une cause rationnelle. Puis quand la tombe de la grand-mère est retrouvée creusée et vide, quand un drame inattendu frappe la famille, le doute se transforme en certitude : quelque chose ne tourne vraiment pas rond chez les Graham.
Hérédité, sans effets faciles, crée et maintient la tension dramatique, par des cadrages et un montage habiles, et, surtout, par la prestation des acteurs. Toni Collette, moins démonstrative que dans la série United States of Tara (2009, curieusement jamais éditée en vidéo en France) communique avec talent la lente glissade d’un personnage torturé vers l’absolue souffrance. Gabriel Byrne, en arrière-plan, fait un psychiatre crédible. Quant aux deux enfants, Alex Wolff, qu’on avait déjà vu dans la série En analyse (In Treatment, 2008), assis sur un canapé face à Gabriel Byrne (maintenant abonné à l’emploi de psychiatre), est remarquablement dirigé et l’image de Milly Shapiro, ici dans un premier rôle (après une courte apparition dans un très court -métrage de 4 minutes, mais une expérience des planches, dès 2013 avec Matilda The Musical) restera gravée dans un coin de la mémoire du cinéphile, précisément dans la case « enfants inquiétants ». On retrouve aussi avec plaisir Ann Dowd qu’on venait tout juste de quitter sous les traits de la Tante Lydia de The Handmaid’s Tale : La Servante écarlate.
Des trouvailles dans la mise en scène révèlent l’originalité prometteuse du réalisateur. Dès le premier plan, un lent panoramique à 180°, parti d’une maison dans les arbres, suivi d’un travelling vers une maison de poupée, jusqu’à une chambre… dont la porte s’ouvre. C’est celle de Peter que son père vient réveiller pour qu’il s’habille pour les obsèques de sa grand-mère. Annie a fidèlement miniaturisé le foyer familial… et ses occupants.
L’accompagnement musical atonal de Colin Stetson, un alliage de sonorités acoustiques et synthétiques, avec de longues notes tenues, renforce encore l’étrangeté du film. Hérédité est une agréable découverte, même si les dernières scènes tendent à dissiper le mystérieux doute que le scénario et la mise en scène avaient réussi à installer.
Hérédité (128 minutes) et ses suppléments (37 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 logé dans un boîtier non fourni pour le test, effectué sur check disc.
Le menu animé et musical propose, outre la version originale, avec sous-titres optionnels, un doublage en français, les deux au format DTS-HD Master Audio 5.1.
Sont également disponibles, une piste d’audiodescription au format Digital Surround DTS 2.0 stéréo et des sous-titres pour malentendants.
Making of Hereditary (20’). Intéressé dès l’adolescence par les films d’horreur, marqué par Carrie de Brian De Palma et, curieusement, par Le Cuisinier, le voleur, sa femme et son amant de Peter Greenaway, le réalisateur a choisi ce genre pour son premier film. Un film d’horreur est d’autant plus efficace qu’on s’attache aux personnages : c’est pourquoi Hérédité est, avant tout, un film sur la famille, un huis clos, dans des décors entièrement construits en studio. Les interventions des acteurs, chantant les louages du réalisateur-scénariste, quand ils ne racontent pas le film, ne sont malheureusement pas à la hauteur de celles d’Ari Aster, trop rares.
Pour suivre, des scènes coupées (17’), une galerie de photos, une vingtaine, et les bandes-annonces (VOST ou VF, au choix) de It Follows (David Robert Mitchell, 2014), Le Secret des Marrowbone (Marrowbone, Sergio G. Sánchez, 2017) Leatherface (Alexandre Bustillo, Julien Maury, 2017) et Le Musée des merveilles (Wonderstruck, Todd Haynes, 2017).
L’image (2.00:1, 1080p, AVC), d’une texture délicate, avec des couleurs soigneusement étalonnées, est dans l’ensemble assez douce, particulièrement pour les scènes filmées dans une semi-obscurité. Un choix délibéré pour souligner l’ambiance mystérieuse du film ?
Le son DTS-HD Master Audio 5.1 de la version originale assure une parfaite clarté des dialogues et donne à l’accompagnement musical une exceptionnelle ampleur. Les voies latérales sont généreusement sollicitées pour créer une impression d’immersion dans l’ambiance, manquant toutefois occasionnellement de cohérence.
Ces appréciations valent pour le doublage en français, artistiquement acceptable.
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