Réalisé par Niccolò Ammaniti
Avec
Edoardo Natoli, Guido Caprino et Alba Rohrwacher
Édité par ARTE ÉDITIONS
À Rome, lors d’une descente de police, un chef mafioso est découvert, baignant dans une mare de sang. Pas le sien, mais celui qui s’écoule des yeux d’une statuette de Madone en plastique. À la veille d’un référendum sur le maintien de l’Italie dans l’Union européenne, Fabrizio Pietromarchi, président du conseil, redoutant une victoire du non, ne veut pas ébruiter la découverte : il ordonne que la statuette soit gardée en toute discrétion par le général Votta, des services secrets. Sandra Roversi, une biologiste, est chargée de rechercher une explication du phénomène.
Il Miracolo, coproduction Sky Italia, Wildside, ARTE France et Kwaï, est une création de Niccolò Ammaniti, un écrivain à succès, considéré dans les années 1990 par la critique italienne comme le chef de file du mouvement cannibale, avec une vue sombre, transgressive sur la société, parfois à travers le prisme de l’horreur.
Niccolò Ammaniti a tenu toutes les ficelles de la série : auteur de l’idée, il a coréalisé tous les épisodes et a dirigé l’équipe de quatre scénaristes composée de Giacomo Durzi, Francesca Manieri, Francesca Marciano et Stefano Bises, actif contributeur à l’écriture de plusieurs séries sur la mafia, dont Corleone (Il Capo dei capi, 2007) et l’extraordinaire Gomorra - La série (2014, 4 saisons dont une attendue en 2019).
Les écrits de Niccolò Ammaniti avaient été plusieurs fois adaptés à l’écran avec L’Ultimo capodanno, une nouvelle (Le dernier réveillon, en 1998), Le Branchie, son premier roman, en 1999, Moi & toi (Io e te, 2012), le dernier film de Bernardo Bertolucci. La meilleure adaptation restant aujourd’hui I’m Not Scared (Io non ho paura, Gabriele Salvatores, 2003).
Non c’è trucco!
Il Miracolo tire son titre de l’étrangeté du phénomène : le volume de sang recueilli en une heure est plus de trois fois celui de la statuette. Mais ce qui compte n’est pas tant l’absence d’une explication scientifique que l’observation des conséquences de la découverte sur quelques personnages, Fabrizio Pietromarchi, agnostique convaincu, le président du conseil en pleine crise politique et conjugale (Guido Caprino, Les Médicis, Maîtres de Florence / Medici, 2016, 2 saisons), Marcello, un prêtre alcoolique, toxicomane, obsédé sexuel, accro aux jeux de grattage et escroc (un rôle qui a valu à Tommaso Ragno le Prix d’interprétation masculine au festival Séries Mania), Sandra la biologiste, interprétée par Alba Rohrwacher (La Solitude des nombres premiers de Saverio Costanzo, 2010, Vierge sous serment / Vergine giurata, Laura Bispuri, 2015), un général, un jeune autiste suspecté, à tort ou à raison, du meurtre d’une adolescente, une nanny polonaise mystique, adepte d’une secte religieuse, Sole, l’épouse de Fabrizio, qu’interprète Elena Lietti avec une émotion contenue… et quelques autres dont le quotidien va être plus ou moins modifié ou qui vont être poussés à des comportements irrationnels par la découverte de la statuette.
L’abbiamo congelata
L’idée vient à Fabrizio de mettre la statuette dans un congélateur pour arrêter un saignement qui commence à poser un problème… de stockage ! Voilà qui lui donne un répit pour estimer, sans précipitation, le bénéfice qu’il pourrait tirer de l’éventuelle divulgation du miracle.
Il Miracolo, accompagnée d’une illustration musicale où se mêlent musique classique, électronique et chansons (dont l’assez ringarde Il Mondo par Jimmy Fontana, pendant le générique) déroule, sur huit jours, un par épisode, un récit curieusement découpé, entrecoupé de flashbacks et de séquences oniriques, avec un assez bon approfondissement des personnages principaux et un regard caustique sur l’Italie (peut-être annonciateur de l’improbable alliance conclue en 2018 entre la Ligue et le Mouvement cinq étoiles) dans un mélange de burlesque, de drame, de comédie, de violence, voire d’horreur, avec une bonne rasade de fantastique et une dose de policier avec l’enquête pour trouver la provenance de la statuette que n’a pas voulu révéler le mafioso.
« Une série construite de la même manière que je construis mes livres, c’est-à-dire que je m’inspire de différents genres et je les inclus dans mes histoires », déclarait Niccolò Ammaniti dans une interview à Séries Mania qui lui a accordé le Prix spécial du jury.
La fin ouverte appelle une suite. Mais, selon les ragots qui ont couru au terme de la diffusion de la série par ARTE, le 24 janvier, pour qu’arrive une saison 2, il faudrait… un miracle !
Il Miracolo (8 épisodes d’une durée cumulée de 390 minutes) et ses suppléments (24 minutes) tiennent sur deux Blu-ray BD-50 logés dans un boîtier de 11 mm, glissé dans un étui.
Le menu animé et musical propose la série dans sa version originale au format DTS-HD Master Audio 2.0 stéréo avec sous-titres imposés (mais idéalement placés sous l’image, sur la bande noire) et dans deux doublages, en français, plutôt réussi, au format DTS-HD MA 5.1 et en allemand, au format DTS-HD MA 2.0 stéréo.
Un choix discutable, le format le plus évolué étant généralement réservé à la version originale.
Sous-titres pour malentendants.
Niccolò Ammaniti, de la page à l’écran (3’). « Cela faisait longtemps que je songeais à réaliser un film, mais chaque histoire devenait un livre » déclare le réalisateur que les photos de tournage montrent totalement investi dans la réalisation de la série, ce que confirment les acteurs et les scénaristes. Azione!
Une galerie de personnages (5’). Niccolò Ammaniti a voulu montrer comment le miracle pouvait faire diversement réagir une galerie de personnages disparates, dont le profil est esquissé par les acteurs principaux.
L’anatomie d’un miracle (3’). Leonardo Cruciano, responsable des effets spéciaux, nous détaille la fabrication, à une vingtaine d’exemplaires, de la statuette en résine polyuréthane et le soin pris pour que les quelques 500 litres de sang artificiel paraissent couler comme des larmes.
Les coulisses (13’). Créateur, réalisateur, scénaristes, directrice de la photographie et acteurs évoquent la diversité des personnages, le rôle unificateur de Niccolò Ammaniti au sein d’une grande équipe qui a collaboré à la mise en images d’une histoire complexe. Des plans de la préparation du tournage, notamment dans l’emblématique piscine, donnent la mesure des moyens investis.
L’image (2.35:1, 1080i, AVC) combinant résolution poussée et texture agréable, propose une riche palette de couleurs naturelles, fermement contrastées, avec des noirs denses, le tout mettant en valeur un beau travail sur la lumière dans de nombreuses scènes filmées en clair-obscur, souvent prises la nuit, en harmonie avec le côté sombre de la série.
Le DTS-HD Master Audio 2.0 stéréo de la version originale restitue parfaitement l’ambiance et l’accompagnement musical, avec une priorisation des dialogues garantissant leur intelligibilité, et une efficace séparation des voies pour l’immersion dans l’action.
Ces remarques valent pour le doublage en français au format DTS-HD MA 5.1 : plutôt réussi, il est un peu plus immersif que celui de la version originale.
On aurait préféré que le son multicanal bénéficie aux deux versions ou, à défaut, qu’il soir réservé à la version originale.
Crédits images : © Montesi Antonello