Réalisé par Nina Companeez
Avec
Muriel Catala, Isabelle Adjani et Marianne Eggerickx
Édité par Éditions Montparnasse
Faustine, 16 ans, annonce à sa camarade de lycée qu’elle va passer l’été à la campagne, chez ses grands-parents. Son attention est immédiatement attirée par les habitants d’une grande maison voisine qu’elle observe, de plus en plus près, dans leurs moments d’intimité, sans être vue, jusqu’au jour où elle est invitée à passer un moment avec eux. Joachim, le fils aîné du propriétaire, est attiré par sa beauté…
Faustine et le bel été, sorti en 1972, le premier long métrage écrit et réalisé par Nina Companeez, fut plutôt bien reçu par le public, mieux que celui qu’elle réalisera l’année suivante, L’Histoire très bonne et très joyeuse de Colinot Trousse Chemise.
Fille de Jacques Companéez (1906-1956), auteur de près d’une centaine de scénarios, notamment de Forfaiture (Marcel L’Herbier, 1947), Les Bas-fonds (Jean Renoir, 1936), Les Maudits (René Clément, 1947), Casque d’Or (Jacques Becker, 1952)… elle entra dans l’univers du cinéma en 1961 en étant, pendant une dizaine d’années, monteuse de dix films et scénariste de treize films de Michel Deville. Ses talents de scénariste furent salués en 1993 par le Grand prix de la SACD (Société des auteurs et compositeurs dramatiques) et elle dut sa réputation de réalisatrice à la mise en scène de remarquables miniséries, telles Les Dames de la côte (1979), L’Allée du Roi (1995), Un Pique-nique chez Osiris (2000).
Faustine et le bel été s’ouvre dans la chambre de Faustine quand elle imagine le dialogue et l’évolution de la relation entre les deux personnages du Baiser, le tableau de Francesco Hayez. Le récit original de Nina Companeez, en partie nourri par des souvenirs de son adolescence, diffuse un délicat parfum d’érotisme en même temps qu’il reste pudique. Faustine, émue par l’éveil de sa sensualité, ne fait qu’imaginer des expériences sexuelles, sans jamais passer à l’acte.
Faustine et le bel été, avec ses allers et retours de la réalité vécue à la réalité rêvée, crée une atmosphère dont la subtilité est accentuée par la poésie sophistiquée des dialogues ou des pensées de Faustine, révélées en voice over au spectateur, et par l’accompagnement au piano de mesures de Chopin, Liszt, Schumann et Tchaïkovsky.
La poésie du film tient aussi à la photographie de Ghislain Cloquet. Chef-opérateur de plus d’une soixantaine de films, notamment en 1966 d’un des chefs-d’oeuvre de Robert Bresson, Au hasard Balthazar, il reçut l’Oscar de la meilleure photo en 1981 pour Tess de Roman Polanski.
Avec l’appui de la productrice Mag Bodard, Nina Companeez réussit à rassembler une distribution assez exceptionnelle pour un premier film. Des jeunes acteurs : Francis Huster, son compagnon, sociétaire de la Comédie Française, Muriel Catala que venait de révéler en 1971 Michel Mardore dans Le Sauveur (elle disparaîtra des écrans en 1979, à 27 ans), Jacques Weber et Isabelle Adjani, dans leur deuxième rôle au cinéma, Jacques Spiesser, dans sa première apparition sur les écrans (à l’instar d’Isabelle Huppert qu’on aperçoit dans une courte scène tout au début du film). Et, aussi, deux acteurs chevronnés, Maurice Garrel, interprète de près de 150 personnages, et Georges Marchal que Luis Buñuel employa quatre fois et mit en tête d’affiche, en 1956, de Cela s’appelle l’aurore et La Mort en ce jardin, aujourd’hui dans l’attente d’une réédition.
Les Éditions Montparnasse offraient déjà dans leur catalogue quatre réalisations importantes de Nina Companeez, Les Dames de la côte, Crébillon fils - La nuit et le moment, L’Allée du roi et À la recherche du temps perdu. C’était une bonne idée d’y ajouter ses deux premiers films, Faustine et le bel été et L’Histoire très bonne et très joyeuse de Colinot Trousse Chemise, tournés en des temps où les réalisatrices françaises se comptaient sur les doigts des deux mains.
Faustine et le bel été (98 minutes) et son supplément (19 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50, logé dans le traditionnel boîtier bleu.
Le film est proposé au format audio Linear PCM 2.0 mono.
Une édition DVD est disponible avec le même contenu.
Entretien avec Aurore Renaut (2024, 19’), coautrice avec Myriam Tsikounas de Nina Companeez : petit écran et grande histoire (Éditions de la Sorbonne, septembre 2024). Nina Companeez, l’une des plus prolifiques et intéressantes réalisatrices françaises de la seconde moitié du XXe siècle, n’est pas reconnue à sa juste valeur », peut-être parce qu’elle a surtout travaillé pour la télévision. Si Faustine et le bel été est son premier film, elle a déjà acquis dans les années 60 une bonne expérience du cinéma en tant que scénariste et monteuse d’une dizaine des premiers films de Michel Deville. Son cinéma populaire, avec des personnages jeunes découvrant la sensualité, se situe dans un cadre intemporel, à l’écart de l’actualité politique, sans revendication féministe. Faustine, que certains ont décrit à tort comme une voyeuse perverse, observe le comportement amoureux des autres, mais ne se sent pas prête à sauter le pas. Les scénarios, que Nina Companeez écrivait seule, développent tous des histoires originales, hormis deux adaptations : À la recherche du temps perdu et L’Allée du roi.
L’image, au ratio d’origine de 1.66:1, a été légèrement recadrée, autour de 1.70:1. Réencodée au standard 1080p, AVC, après une restauration qui a éliminé toute marque de dégradation de la pellicule, elle affiche des couleurs ravivées, naturelles et bien étalonnées. La résolution est correcte, un peu douce toutefois pour révéler tous les détails des plans larges, mais on apprécie la préservation du grain du 35 mm.
Le son mono d’origine, réencodé au standard non compressé Linear PCM 2.0, très propre lui aussi, bénéficie d’une dynamique et d’une ouverture de la bande passante assurant la clarté et le réalisme des dialogues, de la musique et de l’ambiance, dans un bon équilibre.
Crédits images : © Marianne Productions, Parc Film, UGC, Universal Productions France