Réalisé par Woo Min-ho
Avec
Lee Byung-hun, Lee Sung-min et Kwak Do-won
Édité par The Jokers
Le 26 octobre 1979, le président de la Corée du Sud arrive dans son refuge sécurisé pour assister à une réunion organisée par le directeur de la KCIA, l’agence étatique de renseignements. Peu après, un coup de feu éclate : le président Park Chung-he a été assassiné. Un retour en arrière de 40 jours retracera l’enchaînement des faits qui ont conduit au coup d’état.
L’Homme du président (Namsanui bujangdeul), sorti en 2020, est le cinquième long métrage du réalisateur et scénariste Woo Min-ho, le premier à nous arriver en vidéo, pas encore sorti dans nos salles, peut-être à cause du corona virus. Aucun des quatre films précédents n’avait été distribué commercialement en France.
Le scénario de L’Homme du président, coécrit par le réalisateur et Lee Ji-min, coauteur de celui du film The Age of Shadows (Mil-jeong, 2016), s’appuie sur les chroniques Les directeurs de la KCIA publiées pendant 26 mois, à partir de 1990, par le journal Dong a-libo. « Certains passages relèvent néanmoins de la fiction », précise un message.
Un coup de feu hors champ révèle, dès la séquence introductive, l’assassinat du président par le directeur de la KCIA. Juste avant que ne commence le rappel chronologique des faits pendant les 40 jours qui ont précédé l’assassinat qui nourrit tout le récit, l’insert de quelques archives filmées, accompagnées d’un texte, rappelle le contexte historique : le coup d’état militaire du 16 mai 1961 avec la proclamation de la troisième république, la création de la KCIA (Korea Central Intelligence Agency), au-dessus des lois et de la constitution, le rôle-clé qu’elle a joué pendant les 18 années du règne du général Park Chung-hee et la terreur qu’elle inspirait, sous l’autorité de ses chefs, « les directeurs de Namsan », du nom de la colline dominant Séoul où siège son quartier général.
Le rappel du passé s’ouvre par le témoignage fait à Washington par Park Yong-gak, ex-directeur de la KCIA, mettant au grand jour des agissements inavouables et tenus secrets, les atteintes répétées aux droits de l’homme, la corruption, qu’on appellera le « Koreagate », imputables au président Park Chung-hee qui fut aussi l’artisan de l’essor économique du pays. C’est à Washington que se joue le premier acte d’un documentaire-fiction monté comme un véritable thriller qui se poursuivra à Séoul et à Paris, dans une approche assez stricte du sujet, différente de celle, satirique, choisie par Im Sang-soo pour son film The President’s Last Bang (Geuddae geusaramdeul, 2005). Les quelques libertés prises avec la vérité historique pour soutenir la tension dramatique n’empêchent pas que le scénario soit, dans ses grandes lignes, véridique.
L’assassinat de Park Chung-hee n’installera pas la démocratie en Corée : un dictateur en chassant un autre, son successeur, Chun Doo-hwan, sera responsable, le 16 mai 1980, du massacre de Gwangju, évoqué dans Memories of Murder (Salinui chueok, Bong Joon-ho, 2003), dont l’Édition limitée a été saluée par le Prix du meilleur DVD/Blu-ray de patrimoine par le Syndicat Français de la Critique de Cinéma.
L’Homme du président, soigneusement réalisé, a un double mérite. Celui de préciser au spectateur occidental une réalité dont il n’avait au mieux, selon toute probabilité, qu’une image confuse. Et celui de pimenter cette petite leçon d’histoire de rebondissements et de bons moments de suspense.
L’Homme du président (114 minutes) et ses suppléments (18 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 logé dans un boîtier non fourni pour le test, effectué sur un check disc.
Le menu animé et musical propose le film dans sa version originale, en coréen et en anglais, et dans un doublage en français, les deux au format DTS-HD Master Audio 5.1.
L’édition DVD a le même contenu.
Affaire classée - une introduction historique par Stéphane Du Mesnildot (16’) précise le contexte historique du drame, le coup d’état militaire de 1961 dans un pays où la pauvreté (mise en images en 1965 dans le documentaire de Nagisa Ôshima, Le Journal de Yunbogi, dans l’excellent Coffret Nagisa Oshima - 9 films) a entraîné des soulèvements durement réprimés. Park Chung-hee, s’il s’est posé comme un bouclier mettant le pays à l’abri d’une domination par la Corée du Nord, s’il a stimulé l’essor économique et contribué à réduire la pauvreté, a aussi imposé une implacable dictature, jugulant toute opposition, créant un climat d’oppression reflété dans le cinéma coréen, engagé politiquement. Une lecture conseillée avant le visionnement du film.
Bande-annonce.
L’image numérique (1.85:1, 1080p, AVC), avec des couleurs naturelles, a été subtilement adoucie par l’ajout d’un léger grain qui lui donne la texture de la pellicule 35 mm qui aurait été utilisée à la fin des années 70. Lumineuse, délicatement contrastée, avec des noirs denses, elle garantit une parfaite lisibilité des scènes de nuit.
Le son DTS-HD Master Audio 5.1 de la version originale restitue clairement les dialogues, dans un bon équilibre avec l’agréable accompagnement musical de Jo Yeong-wook (Le Gangster, le Flic & l’Assassin / Akinjeon, Lee Won-Tae, 2019). Une efficace répartition du signal sur les cinq canaux place le spectateur au centre de l’action.
Le doublage en français, assez bien fait, appelle les mêmes observations.
Crédits images : © Gemstone Pictures, Hive Media