Réalisé par Sam Peckinpah
Avec
James Coburn, Maximilian Schell et James Mason
Édité par Studiocanal
Péninsule de Taman, 1943. Les armées allemandes battent en retraite. Le régiment que commande le colonel Brandt est rejoint par un nouveau commandant de bataillon, le capitaine Stransky, un aristocrate prussien qui s’est porté volontaire pour le front russe afin d’en rapporter une Croix de fer, symbole convoité de bravoure. Une antipathie profonde s’instaure aussitôt entre ce dernier et le sergent Steiner, un baroudeur aimé de ses hommes mais qui méprise les officiers…
Croix de fer (Cross of Iron), sorti en 1977, une coproduction germano-anglo-yougoslave, est le treizième des quinze longs métrages de Sam Peckinpah (1925-1984). Suivront Le Convoi (Convoy, 1978) et Osterman Week-End (1983).
Le scénario adapte fidèlement Das geduldige Fleisch (littéralement « la chair patiente », initialement publié en France sous le titre La Peau des hommes), le roman écrit en 1955 par Willi Heinrich (1920-2005), inspiré de son vécu de la retraite de 1943, au sein de la 101ème Jäger Division, dans la péninsule de Taman, proche de la Crimée.
We are not retreating. We are running!
Croix de fer accorde, en pleine débâcle de l’armée allemande après sa défaite à Stalingrad le 2 févier 1943, une large place aux scènes d’action dont la violence est dilatée par les ralentis rappelant ceux de La Horde sauvage (The Wild Bunch, 1969).
Le générique s’ouvre sur des archives filmées de la seconde guerre mondiale, ironiquement accompagnées par Hänschen klein, Ging allein, une comptine populaire chantée par des enfants, vite remplacée par une marche militaire.
Avec de grands moments de suspense, par exemple dans les scènes de la traversée d’un pont de bois gardé par des sentinelles russes, le scénario souligne l’opposition ouverte entre Rolf Steiner, un caporal roturier, et le capitaine Stransky, un aristocrate prussien, tout juste promu à la tête de la compagnie, prêt à tout pour obtenir la Croix de fer… sauf à risquer sa vie !
Le film, comme le roman, met en avant le personnage de Rolf Steiner (il fut distribué en Allemagne sous le titre Steiner - Das eiserne Kreuz), sobrement interprété par James Coburn (ce fut la troisième de ses quatre collaborations avec Sam Peckinpah), dans un de ses plus beaux rôles. Il est soutenu par James Mason, Maximilian Schell et David Warner, tout juste sorti du tournage du Providence d’Alain Resnais.
Croix de fer est le seul film sur la seconde guerre mondiale vue par les soldats allemands, les Russes n’apparaissant qu’à distance et furtivement. Le spectateur est amené à sympathiser avec la plupart des soldats de la Wehrmacht, entraînés dans un cauchemar sans l’avoir voulu, ne se battant que pour tenter de survivre, cherchant à imaginer ce que sera leur vie après l’inéluctable défaite.
Impossible d’oublier Croix de fer, du premier à son dernier plan, l’éclat de rire de Steiner : une fin insolite, une réponse inspirée de Sam Peckinpah au refus des producteurs de lui allouer les trois ou quatre jours supplémentaires requis pour tourner le dénouement prévu par le scénario.
Le film, devenu introuvable, nous revient après une restauration opérée pour Studiocanal en 2023 par Silver Salt Restoration UK à partir d’un scan 4K du négatif original. L’élimination des marques de détérioration de la pellicule a demandé 240 heures de travail et tout a été fait pour corriger les problèmes de densité et de stabilité lumineuse, nous dit un carton.
Croix de fer (133 minutes) et une partie de ses suppléments (47 minutes, sans compter le commentaire audio) sont supportés par un Blu-ray 4K UHD BD-100 et par un Blu-ray BD-50. Le reste des suppléments (112 minutes) tient sur un deuxième Blu-ray BD-50.
Les trois disques sont logés dans un SteelBook orné d’une sérigraphie reprenant le motif de l’affiche la plus connue du film. Au verso, une composition dans le même style avec la mention « Men on the front line of hell ».
Le menu propose le film dans sa version originale, en anglais, et dans un doublage en français ou en allemand, tous au format audio Linear PCM 2.0 mono.
Sous-titres français, allemands et anglais pour malentendants.
Sur le Blu-ray 4K UHD et le Blu-ray BD-50 du film :
Commentaire audio par Mike Siegel, historien du cinéma et réalisateur. Auteur de plusieurs publications sur Peckinpah et, en 2005, du documentaire Passion & Poetry: The Ballad of Sam Peckinpah, il avait déjà commenté son dernier film, The Osterman Weekend. Après avoir avoué n’être pas critique de cinéma, il rappelle une méthode de Peckinpah : le montage, qu’il assurait lui-même, de plans pris par plusieurs caméras. Croix de fer eut le même impact que Chiens de paille (Straw Dogs, 1971) et La Horde sauvage, bien que les biographies du réalisateur ne lui donnent que peu de place. Sam Peckinpah est venu tardivement au cinéma comme assistant, notamment de Don Siegel, « son mentor », après une expérience de la télévision pour laquelle il créa The Westerner, « une des meilleures séries télévisées ». Mike Siegel évoque les acteurs, les lieux de tournage, la scène finale, la postproduction, le beau succès du film en Europe (3,5 millions d’entrées en Allemagne de l’Ouest), décevant aux USA… Ce commentaire passionné, enregistré spécialement pour cette édition, à défaut d’une analyse du film, propose d’intéressantes digressions sur l’oeuvre, la vie, le style et « la poésie » de Sam Peckinpah.
Suivent quatre montages, réalisés en 2023 pour cette édition par Mike Siegel, de plus de 200 photos ou documents qu’il a collectionnés :
La promotion du film (2023, 10’), un impressionnant défilé, dans toutes langues, de photos d’exploitation, d’affiches, de jaquettes se VHS, DVD ou CD, de dossiers de presse.
Sur le tournage (2023, 10’) : sélection d’une centaine de photos de plateau inédites en noir et blanc.
Filmer Croix de fer, partie 1 (9’) : une autre série inédite de photos de plateau, tirées de planches contact.
Filmer Croix de fer, partie 2 (9’), la suite de la série précédente.
Croix de fer en couleurs (9’) : 100 photos de plateau, celles-là en couleurs.
Sur le Blu-ray de bonus :
Passion et poésie : la guerre vue par Sam Peckinpah (Passion & Poetry: Sam Peckinpah’s War, 108’). Mike Siegel avait, dans son documentaire réalisé en 2005, Passion & Poetry: The Ballad of Sam Peckinpah, recueilli les souvenirs d’acteurs et techniciens sur le réalisateur. Pour ce nouveau documentaire consacré à Croix de fer, il a puisé dans son film de 2005 et dans ses archives pour rassembler les vues des acteurs sur les personnages, sur leurs relations avec Sam Peckinpah, sur l’attention qu’il portait aux détails… Le film est divisé en 10 chapitres : Haüger embrasse Hern, Vadim et Sam : père et fils, La salle de montage, Steiner au Japon : publicités tournées en 1977, Mike’s home movies : Steiner et Kiesel se rencontrent à nouveau, Sur le tournage : Sam Peckinpah, Sur le tournage : James Coburn, Sur le tournage : Maximilian Schell, Sur le tournage : James Mason, Sur le tournage : David Warner. Un précieux documentaire rétrospectif sur la réalisation de Croix de fer !
Bande-annonce anglaise, recadrée à 1.33:1 (3’54’).
L’image, au ratio originel de 1.85:1, après encodage 2180p, HEVC, Dolby Vision, HDR10, d’une impeccable propreté, offre une fine résolution, appréciable tant sur les plans rapprochés que sur les plans larges, sur toute la profondeur de champ. La restauration de 2023 a respecté la texture originelle en préservant le grain de la pellicule 35 mm. Les couleurs de la précédente édition de 2012, ternies par une dominante verdâtre, ont nettement gagné en éclat, finesse et naturel.
Le son mono d’origine, réencodé au format non compressé Linear PCM 2.0 mono, très propre lui aussi, sans souffle, assure la clarté des dialogues et donne une forte présence au tonnerre des scènes de bataille. Une force qui fait bon ménage avec finesse dont profite la belle partition originale d’Ernest Gold, oscarisé en 1961 pour Exodus d’Otto Preminger.
Ces observations valent pour le doublage en français.
Crédits images : © Studiocanal - Terra Filmkunst, Rapid Film, EMI Films Ltd., Radiant Productions