Chinatown (1974) : le test complet du 4K UHD

Paramount fête avec les honneurs le cinquantième anniversaire d’un magnifique hommage de Roman Polanski au film noir.

Jake Gittes, détective privé, reçoit la visite d’une fausse Mme Mulwray qui lui demande de filer son mari, ingénieur des eaux à Los Angeles, qu’elle suspecte d’infidélité. Celui-ci est retrouvé mort, noyé. Gittes s’obstine dans son enquête, malgré les menaces de tueurs professionnels…

Chinatown, sorti en 1974, récompensé par une vingtaine de prix, dont l’Oscar du meilleur scénario original, par les BAFTA Awards du meilleur scénario et de la meilleure réalisation, par les Golden Globes du meilleur film dramatique, de la meilleure réalisation et du meilleur scénario, est le huitième long métrage de Roman Polanski et le troisième qu’il réalise aux USA.

Chinatown met en images un scénario original de Robert Towne qui avait contribué à l’écriture de Bonnie & Clyde et de John McCabe, sans que son nom apparaisse au générique. Sa première collaboration avec Roman Polanski lança une carrière marquée par Shampoo, Greystoke: The Legend of Tarzan, Lord of the Apes, M:I : Mission : Impossible et M:I-2 - Mission : Impossible 2. Le scénario, solidement documenté, est une dénonciation des dommages environnementaux causés par l’appropriation par la ville de Los Angeles de l’eau captée par un aqueduc au pied de la Sierra Nevada.

Chinatown, avec ses personnages complexes, est un goûteux cocktail de film noir, de romance et de documentaire. Derrière l’apparente simplicité de sa mise en scène se cache une recherche aboutie des cadrages, de l’enchaînement des plans, marques du talent du réalisateur et d’une maîtrise acquise avec une dizaine de longs métrages reconnus par le grand public et la critique, de Le Couteau dans l’eau (Nóz w wodzie, 1962), en passant par Rosemary’s Baby, son premier grand succès commercial aux USA, produit par Paramount Pictures.

Une autre force du film est sa solide distribution avec Jack Nicholson, Faye Dunaway et le réalisateur de Le Faucon maltais (The Maltese Falcon, 1949), John Huston, dans un des quelques cinquante rôles qu’il tint au long de sa carrière de cinéaste. Roman Polanski campe un petit malfrat apparaissant dans deux ou trois scènes.

Cette édition du cinquantième anniversaire nous propose le film après une excellente restauration après scan 4K du négatif original, probablement celle opérée pour la ressortie du film en 2018.

Chinatown (130 minutes) et ses généreux suppléments (189 minutes, sans compter le commentaire audio du film) tiennent sur un Blu-ray BD-100 4K UHD logé, dans cette édition combo, avec un Blu-ray BD-50 supportant le seul film, dans un boîtier avec fourreau, non fourni pour le test, effectué sur le seul Blu-ray UHD.

Le film est proposé dans sa version originale, l’anglais, avec le choix entre un remixage Dolby TrueHD 5.1 et le mono d’origine au format Dolby Digital 2.0, et dans un doublage en français, allemand, espagnol et italien Dolby Digital 2.0 mono.

Sous-titres anglais pour malentendants.

Tous les suppléments, certains exclusifs, d’autres repris d’éditions antérieures, en anglais, sous-titrés, sont, une fois n’est pas coutume, supportés par le seul Blu-ray 4K UHD.

Commentaire audio du scénariste Robert Towne et du réalisateur David Fincher (sous-titré). Leur commentaire, informatif et structuré, souligne la beauté et la pertinence des cadrages, la subtilité de la mise en scène, l’efficacité de la direction des acteurs, l’adéquation de l’accompagnement musical…

Un état d’esprit : Sam Wasson parle de Chinatown (A State of Mind: author Sam Wasson on Chinatown, 2024, 16’). L’auteur de The Big Goodbye: Chinatown and the Last Years of Hollywood (Flatiron Books. 2019) rappelle les réticences de Roman Polanski à se soumettre à Paramount, alors le plus grand studio de la « perverse » Hollywood. Mais le soutien de Robert Evans, alors à la tête du studio qui avait produit Rosemary’s Babyen 1967, lui permit de recruter une distribution classieuse tout en lui assurant l’indépendance attendue.

Souvenirs de Chinatown (Chinatown Memories, 2024, 6’), essentiellement l’anecdote du cheveu rebelle de Faye Dunaway que Roman Polanski finit par arracher.

La trilogie qui n’existe pas (The Trilogy That Never Was, 2024, 2’). Après The Two Jales, une autre enquête de Jake Gittes que Jack Nicholson réalisa en 1990, un troisième film resta à l’état de projet.

Eau et pouvoir  (Water & Power, 2009, 77’), divisé en trois chapitres, L’aqueduc, Les séquelles et Le fleuve et au-delà, rappelle que Los Angeles a commencé la captation de l’eau provenant de la fonte des neiges de la Sierra Nevada par la construction en 1913 d’un aqueduc long de 375 kilomètres, puis d’un second en 1970, entraînant l’assèchement de l’Owens Valley, une pollution par la poussière soulevée par le vent, la revente à des promoteurs immobiliers de terres devenues incultes achetées pour une bouchée de pain… jusqu’à ce qu’au début des années 2000, une prise de conscience des nuisances conduise à l’instauration de mesures correctives.

Chinatown : une évaluation (Chinatown: An Appreciation, 2009, 26’). Steven Soderbergh, Kimberly Peirce (Boys Don’t Cry) et quelques autres louent la richesse d’une fiction sur le pouvoir et la trahison, l’implacable mécanique du scénario, sa vision claire d’une réalité, ainsi que la qualité de la distribution et l’élégance de la réalisation…

Chinatown : début et fin (Chinatown: The Beginning and the End, 2007, 19’). Roman Polanski rappelle ses réticences à revenir en Californie après l’assassinat de Sharon Tate en 1969 par le clan Charles Manson et Robert Towne évoque la genèse du scénario, la fin imposée par le réalisateur…

Chinatown : le tournage (Chinatown: Filming, 2007, 26’). Roman Polanski se souvient d’avoir obtenu de Robert Evans tout ce qu’il demandait, des repérages faits par Robert Towne pendant l’écriture du scénario, de la liberté qu’il laissa au chef-opérateur John A. Alonzo, sauf pour les cadrages qu’il souhaitait contrôler…

Chinatown : l’héritage (Chinatown: The Legacy, 2007, 10’). La musique du film fut commandée à Jerry Goldsmith peu de temps avant sa sortie. Chinatown, le film préféré de Roman Polanski après The Pianist, connut un franc succès, aux USA et ailleurs…

Bande-annonce (3’17”, VO).

L’image, au ratio originel de 2.35:1, encodée au standard 2160p, HEVC HDR10 - Dolby Vision, d’une irréprochable propreté, affiche un sensible gain de résolution sur l’édition de 2012, avec un affinement du grain qui ne dénature pas la texture originelle. Un nouvel étalonnage, dans une palette délibérément peu saturée, nuance délicatement les couleurs, particulièrement les tons de peau.

Le son mono d’origine, reprend le remixage au format Dolby TrueHD 5.1 de l’édition de 2012. Très propre, il garantit la parfaite clarté des dialogues. L’ouverture de la bande passante et une bonne dynamique assurent le réalisme de l’ambiance, avec un effet immersif dans quelques scènes d’extérieur. Finesse et aération mettent en valeur la belle partition de Jerry Goldsmith.

Le doublage en français, limité au standard Dolby Digital 2.0 mono, n’a pas été pris en compte pour l’attribution de la note.

Crédits images : © Paramount Pictures, Robert Evans, Long Road