Réalisé par M. Night Shyamalan
Avec
Mel Gibson, Joaquin Phoenix et Rory Culkin
Édité par Touchstone Home Video
Parler d’un film de Manoj Night Shyamalan relève toujours de
l’exercice périlleux, si on ne veut pas gâcher le plaisir du
spectateur qui ne l’aurait pas encore vu. Après
Sixième sens et Incassable (on
oubliera ses 2 premiers films méconnus, « Praying with Anger »
et « Wide Awake »), « Signes » ne déroge pas à la règle.
« Signes » nous conte une invasion extra-terrestre, vue par le
petit bout de la lorgnette (à l’exact opposé d’un
Independence Day, donc). En effet, inutile d’attendre
des vaisseaux spatiaux de plusieurs kilomètres de long, ni de
batailles rangées entre des milliers d’engins volants.
Shyamalan se concentre sur 4 personnages (un père, son frère
et ses 2 enfants) réfugiés dans leur maison au milieu de
champ de maïs, et toute l’action se déroulera donc dans cet
unique unité de lieu.
Pour être précis, il faudrait ajouter 2 protagonistes : le
réalisateur lui-même… et le spectateur.
En effet, suite à l’échec (relatif) de « Incassable »,
Shyamalan décide de s’embarquer avec son public au coeur même
de son histoire, et utilise pour cela une mise en scène
experte, utilisant des plans serrés latéralement (peu
d’ouverture sur les côtés) mais d’une grande profondeur (un
personnage au premier plan, un autre plus loin, puis un
troisième niveau en arrière-plan), donnant l’équivalence
d’une vision normale et intégrant le spectateur dans
l’action.
Plus fort : lors d’une séquence, le petit Morgan désigne la
caméra en s’exclamant « C’est lui ? », semblant désigner le
spectateur avant qu’un contre-champ fasse apparaître… M.
Night Shyamalan, s’octroyant pour l’occasion un rôle
déterminant dans son film. On peut difficilement trouver
rapport plus direct entre un cinéaste et son public.
Mettant volontairement de côté les scènes spectaculaires
(même l’extra-terrestre n’est la plupart du temps montré que
par un reflet), l’histoire (écrite comme à son habitude par
Shyamalan) se concentre sur le microcosme de ses personnages,
l’invasion alien sur le reste du monde n’étant montrée que
par l’intermédiaire d’une télévision (envahissante, elle
aussi…). Comme sur ses 2 précédents films, le final permet
de lier divers éléments disséminés dans le métrage, mais
cette fois non pas pour offrir un retournement de situation
mais pour permettre au personnage joué (fort justement) par
Mel Gibson, un prêtre ayant perdu la foi suite à la mort de
sa femme, de se reconstruire.
Tour à tour intriguant (on se demande constamment où le film
va nous emmener), flippant (les dernières 30 minutes nous
collent à notre siège), émouvant, « Signes » est une superbe
marque d’estime d’un réalisateur vers son public, et nous
montre une fois de plus la capacité de ce cinéaste de lier
des thèmes sans point commun par l’intermédiaire d’une vision
intimiste et profondément humaine.
Pas de fioritures dans le packaging, même pas de feuillet
intérieur avec la liste des chapitres.
Le disque est sobrement mais néanmoins efficacement
sérigraphié.
Les menus (sonorisés en 5.1) sont d’une grande simplicité
(limite basique). Le chapitrage est animé et sonorisé.
Superbe Making of (58’54”) dû à l’incontournable
Laurent Bouzereau, d’une concision et d’une densité
exemplaire. Les 6 chapitres offrent un panorama de la
production du film, de l’écriture du scénario à la première
du film en passant par les effets numériques. Chaque segment
est longuement commenté par le réalisateur du film (épaulé
par les producteurs et les acteurs), et l’ensemble permet
d’avoir une idée de la méthode Shyamalan : ses influences (en
l’occurrence Les Oiseaux d’Alfred Hitchcock, « La nuit des
morts-vivants » de George Romero, et
L’Invasion des profanateurs de sépultures de Don Siegel), le
story-board, la direction des acteurs, son implication dans
la bande sonore, jusqu’à l’aspect promotionnel (bandes-
annonces, affiche). Un documentaire d’un grand intérêt du
début à la fin.
Scènes coupées (ou rallongées) au nombre de 5 (pour
une durée totale de 7’42”, en 4/3 1:85, VOST), dont certaines
muettes. Où on s’aperçoit que le réalisateur a décidé
d’éliminer au montage les scènes de flash-back de Graham Hess
avec sa femme encore vivante. La dernière séquence présentée
(la tentative d’intrusion des aliens par le grenier de la
ferme) est de loin la plus intéressante, et aurait pu sans
problème trouver sa place dans le métrage.
Story-board (2’58”) : possibilité de comparer en
multi-angle le storyboard de la scène du garde-manger avec le
résultat final, avec la possibilité d’intégrer soit les
bruitages sonores, soit la musique isolée, soit l’intégralité
du mixage. Intéressant pour comprendre comme c’est la somme
de plusieurs éléments qui fait l’efficacité d’une scène.
Court-métrage (2’19”) de jeunesse de M. Night
Shyamalan, ou plutôt un extrait de son premier « film de
monstres ». Le réalisateur, qui présente lui-même ce segment,
se fait plaisir en exhumant ses premières oeuvres, et fait
preuve d’un réel courage en nous les montrant…
Un commentaire audio du cinéaste aurait ajouté à notre
bonheur…
Un master tiré d’une superbe copie sans défaut nous offre une
image d’une grande clarté.
L’étalonnage est bien maîtrisé, particulièrement sur les
contrastes qui illuminent les scènes claires et donnent une
grande profondeur aux scènes sombres.
Seule petite ombre au tableau : vraisemblablement à cause du
grand nombre d’informations stockées sur un seul disque (film
+ 2 pistes Dolby Digital + 1 piste DTS + suppléments : ça
fait beaucoup), la compression donne quelques signes de
faiblesse (voir les plans mouvants sur les champs, par
exemple en 5’10”).
A l’image de celles de Les Autres, les pistes sonores
sont d’une grande efficacité, distillant des ambiances calmes
pour mieux nous surprendre et nous tenir en haleine aux
moments opportuns.
Les versions Dolby Digital sont équivalentes, avec une bonne
spatialisation sur les différents canaux, ceux-ci étant très
justement utilisés pour nous plonger dans l’ambiance. La
superbe partition de James Newton Howard est particulièrement
mise en valeur.
La piste VF DTS est plus précise, aussi bien dans
l’utilisation des canaux (les mouvements en paraissent
d’autant mieux localisés) que dans la profondeur des basses
(voir par exemple en 1h13’38” : décollage du siège assuré !).