Réalisé par Kent Jones
Avec
Alfred Hitchcock, François Truffaut et Wes Anderson
Édité par ARTE ÉDITIONS
En 1962, Hitchcock et Truffaut s’enferment pendant une semaine à Hollywood pour mettre à jour les secrets de la mise en scène au cinéma. À partir des enregistrements de cette rencontre qui servirent à élaborer le livre mythique « Hitchcock/Truffaut », le film de Kent Jones met en image la plus grande et la plus éclairante leçon de cinéma de tous les temps, et nous plonge dans l’univers de l’auteur de Psychose, Les Oiseaux et Sueurs froides.
Kent Jones réalise en 2015 Hitchcock/Truffaut dont il cosigne le scénario avec Serge Toubiana. C’est son troisième documentaire sur le cinéma après Val Lewton: The Man in the Shadows (2004) sur le producteur de films fantastiques de la RKO et A Letter to Elia (2010), un hommage à Elia Kazan.
François Truffaut, quand il proposa à Alfred Hitchcock le long entretien qui lui permit de rassembler le matériau pour l’écriture du livre qui paraîtra en 1966, n’avait réalisé que trois films, Les Quatre cents coups, Tirez sur le pianiste et Jules et Jim. Mais il avait découvert, longtemps avant, l’originalité du cinéma hitchcockien, au temps où il était critique aux Cahiers du cinéma.
Hitchcock/Truffaut cherche, après avoir rapidement retracé la vie du cinéaste, à dégager les lignes de force de son style. Né avec le cinéma, Alfred Hitchcock atteint son apogée à partir des années 50 avec, notamment, L’Inconnu du Nord-Express (Strangers on a Train, 1951), Fenêtre sur cour (Rear Window, 1954), L’Homme qui en savait trop (TheMan Who Knew Too Much, 1956), Sueurs froides (1958, Vertigo).
Hitchcock/Truffaut s’appuie sur des citations extraites de l’ouvrage de Truffaut, recueille les vues de plusieurs réalisateurs, David Fincher, Paul Schrader, Martin Scorsese, Olivier Assayas, Wes Anderson, Paul Bogdanovich, Akira Kurosawa, Jean Renoir, James Gray… Le tout est illustré de quelques interviews de Hitchcock, d’extraits des enregistrements en traduction simultanée des entretiens de 1962 et d’extraits de films.
Se dégagent, avec exemples à l’appui, les caractéristiques de l’écriture cinématographique d’Alfred Hitchcock. L’importance attachée à la construction d’un plan : cadrage, angle de prise de vue, choix de la focale, éclairage. Également, l’importance donnée au temps qui peut, en fonction des besoins d’une scène, se dilater ou, au contraire, s’étaler. Est aussi évoquée la place des acteurs qu’Alfred Hitchcock voulait pouvoir diriger à sa guise (« All actors are cattle »).
Au-delà de la forme, Hitchcock/Truffaut explore aussi le poids de la culpabilité, omniprésente dans le cinéma de Hitchcock. Est donnée en illustration la remarquable séquence du (1956, The Wrong Man) dans laquelle un homme s’avance dans la nuit vers la caméra jusqu’à ce que son visage vienne se superposer à celui de John Fonda, filmé en gros plan. Est aussi rappelée la place que prenaient, particulièrement dans Sueurs froides, l’érotisme, suggéré sans être montré, l’onirisme et la distance prise avec la réalité : « I can’t do well with the ordinary » disait Hitchcock.
Un document dense, utile à celles et ceux qui voudront découvrir le cinéma d’Alfred Hitchcock ou en approfondir leur connaissance.
Hitchcock/Truffaut, d’une durée de 76 minutes tient, avec son supplément, sur un DVD-9 présenté dans un boîtier, inséré dans un étui. Le menu animé et musical propose le film en deux versions : la version originale (Dolby Digital 5.1) en français et en anglais, avec sous-titres français imposés, et un doublage français (Dolby Digital 2.0) en voice over. Le changement de version oblige à revenir au menu et à reprendre la lecture du film à son début.
Sous-titres pour malentendants.
En supplément, Hitchcock vu par… (41’ en français et en anglais avec sous-titres optionnels), un document exclusif produit par Artline Films (groupe Arte) où l’on retrouve certains des intervenants du film pour des déclarations complémentaires, sans redites. La modernité du cinéma de Hitchcock est mise en avant, la composition soignée des cadres, la virtuosité du montage de ses films… en somme, son génie de la forme. Est souligné comment, lors du passage au cinéma parlant, il a réussi à conserver le « langage » du muet, etc.
L’image (1.78:1 et d’autres formats pour les inserts d’archives) n’appelle aucun reproche.
Le format multicanal n’apporte à peu près rien au son de la version originale (Dolby Digital 5.1). Mais tous les commentaires sont clairs, ce qui est l’essentiel. On aurait préféré des sous-titres au doublage en voice over de la version dite française.
Crédits images : © Artline Films, Cohen Media Group